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MARIO MALIVERT - LA POESIE AU PLURIEL 
 
 
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CE QUE DISENT LES CRITIQUES:

Une poésie forte et incantatoire 
Le Nouvelliste No 38796 Mercredi 25 juillet 2012 
 
Par Robenson Bernard
 
 
Le nouveau recueil de poèmes « La tête chauve des mornes » de Mario Malivert, médecin de formation, forme un paradigme récurrent traduisant le symbole des contradictions sociales de notre temps. Poids des héritages historiques, afflux ou mobilité excessive de la population, l'érosion des terres cultivables due au déboisement est symptomatique de la forme sociale de la cité, c'est-à-dire des rapports de groupes d'habitants entre eux et avec le lieu, avec leur environnement immédiat et les autres espaces urbains. Cela frise l'inespéré, mais le poète, débarrassé de toute intimidation, récite par bribes, une parole d'espoir. La métaphore dès lors devient merveilleusement ouverte sur un réseau de significations pulsionnelles, attendrissantes. 
 
Ce n’est point un hasard si ce cahier de vers s’intitule ''La tête chauve des mornes''. On éprouve un certain plaisir à en découvrir le sens et la portée. L’idée vient d’une blessure, d’une réalité qui décrit et révèle manifestement une structure de notre existence physique. Mario Malivert l’exprime en sensations et en émotions. L’émotion est la preuve de l’âme, tout comme la sensation est la preuve du corps.  
 
L’environnement, fragment de notre vie de peuple, lui a donné un sursaut. Et ce n’est pas le résultat d’un mouvement onirique. Loin s’en faut. 
 
Composé de trois parties : La tête chauve des mornes, Soubresauts et 20 sonnets pour combler l’ennui, le livre procède par accumulation d’évidences. Les mornes trouvent grâce aux yeux du poète. Car ils sont le rempart salutaire de l’espace (sub) urbain. Mario Malivert nomme chaque chose : glissade, grottes, labyrinthe, éclaboussure, éboulement, sinistre, black-out, etc. Il stigmatise les nébuleuses urbaines et voit ce qui saute aux yeux. 
 
La tête chauve des mornes s’inscrit dans la série de désenchantements ou apocalypses qui jalonnent notre époque et qui laissent leurs traces indélébiles sur la cité confrontée désespérément à un déficit social qui nous invite à exprimer notre refus de nous attacher à nos tranquilles et coupables illusions. 
 
Le fil des vies acides s’étend… 
Chute libre sans bas-fond 
Destin tout tracé 
Dans la boue des villages de carton 
De Cité Soleil ou de Darfour (in Cercle vicieux, p. 33) 
 
Mario Malivert, dont l’œuvre se présente tout entière en vers libres, fait ses poèmes aussi bien avec des idées qu’avec des mots, n’en déplaise au principe du dadaïsme selon lequel le sens ne peut préexister au poème, mais il est entraîné par lui, par sa propre logique. Principe par lequel Mallarmé avait volontiers adhéré comme il le disait au peintre Degas. 
 
La poésie de Malivert est un langage à part. L’espace poétique est à distinguer fondamentalement de l’espace polémique. Celui-ci supplante celui-là, car il aide mieux à nommer l’innommable et met en évidence la forme sensible des mots, la polyphonie du signifiant par exploitation de la polysémie. Le contexte est là pour servir de support à cette démultiplication du sens. 
 
D’un poème à l’autre, les vers recouvrent tout comme le sable du désert : chômage, désastre, urbanisme, précarité des vies. Malivert ne sacrifie pas son discours au vernis de la modernité. Fragmentés, ses poèmes voguent dans sa conscience. Il est peu souhaitable pour lui de se soustraire à cet élan sur un mode incantatoire. Les métaphores sont parlantes, les allitérations aussi : 
 
Le fatras nous hante 
La fumée danse dans sa robe violette (in Trop-plein, p 24) 
 
Ou encore : 
Le cafouillage des tap-tap 
Sur des rues tordues 
Les femmes déambulent 
Pommes roulantes 
Ecorce fine 
Pulpe charnue 
Les marchés à tout bout de rue 
Amas de sueur et de poussière 
La crasse qui s’entasse (in Port-au-Prince, p 36) 
 
C’est évident : le langage est direct, sinon cru en quelque sorte. C’est la trame serrée de l’oralité qui scelle l’écrit schématisé. Mais cette écriture n’est ni transcendance, ni littéralité. Elle est la lettre en première instance de ce qui, du réel, du mouvant et de l’imperturbable, se voit. Epouvantable. Elle est transfert et transport de ceux qui n’écrivent pas pour dire l’essentiel sans bégayer. Pas de ruse dans la perspective de Malivert. C’est, pour tout dire, l’émerveillement de l’abrupt au sens où l’entendait Senghor, parlant de la peinture haïtienne d’un certain courant. 
 
Robenson BERNARD robernard2202@yahoo.fr 
 
Mario Malivert La tête chauve des mornes (poèmes), 102 p Lettres Terres Le chasseur abstrait éditeur, 2012 
 
 
 
 
LE MANOIR DES POETES  
No.15 Ete-Automne 2007, p.43  
 
Continuons notre moisson avec "De la mort à la vie" de Mario Malivert, qui nous vient d'Haïti où il a été publié en 2006. L'auteur retrace en cris déchirants son douloureux passage de l'inconscience à la conscience: des plaisirs temporels superficiels et indispensablement recommencés jusqu'au bonheur ineffable et profond de la relation intemporelle au divin. La découverte de la joie absolue dans la main du Sauveur. Une vue un peu manichéenne entre la "destination néant où "les joies se changent en lassitude/l'extase en ennui" et ce code d'accès "nom de passe: Jésus" où "il a fallu que j'échoue/ que mes châteaux s'écroulent/ pour ramper jusqu'à sa croix" 
 
Voilà l'auteur propulsé dans "la félicité du royaume", avec destination ciel". Un cheminement douloureux comme tous les cheminements vers la pleine conscience et la libération, qui s'épanouit dans l'amour divin accompagné par la compagne élue du cœur. De très beaux textes très bien écrits, encourageants aussi pour ceux qui sont sur ce chemin de croix et cherchent un secours qu'ils portent en eux tout au long. 
 
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Connecticut Haitian Voice  
Volume 1 – Number 8 - February 2007 
Page 6 
 
Extraits d’une entrevue accordée à Connecticut Haitian Voice
 
 
Connecticut Haitian Voice : Pouvez vous nous dire en tant qu’auteur ou travailleur de la plume d’où vient votre intérêt dans la chose littéraire? De quand datent vos premiers écrits et quelles influences avez-vous subies? 
 
Mario Malivert: J’ai découvert la plume dans mon adolescence, quand je faisais face à des moment de malaise et d’insécurité. La poésie fut pour moi, et l’est encore aujourd’hui, un coin tranquille, un exutoire, où je peux récréer mon monde à moi. J’ai commencé à griffonner des poèmes dans mes cahiers d’écolier, jusqu’à ce que le poète Christophe Charles, mon professeur de littérature haitienne d’alors, remarqua mon penchant pour l’écriture et publia mon premier recueil de poèmes, Arène Noire, dans les Editions Choucoune, en Haiti.  
A travers mes lectures, j’ai savouré les poèmes de divers poètes ; cependant, ayant toujours été à la poursuite de l’originalité, je me suis toujours efforcé à ne pas me laisser directement influencer par un auteur spécifique. 
 
Pouvez vous retracer pour les lecteurs le cheminement qui a conduit à la sortie de votre livre : quelles ont été vos sources d’inspirations, vos motivations, votre parcours? 
 
Ma poésie a toujours réflété, naturellement, les thèmes dominants de ma vie. Si Arène Noire (1982) brillait par son cachet militant et Vin Aigre (1989) par l’introspection soutenue, de la Mort à la Vie, mon troisième recueil de poèmes, se distingue par sa verve spirituelle. En effet, les trois premiers chapitres retracent, en particulier, mon itinéraire chrétien de la mort spirituelle à la vie spirituelle. J’ai voulu, avec ce recueil, marquer mon retour à l’écriture—après une absence de seize ans—par un témoignage flagrant de la place primordiale de ma foi chrétienne dans tous les aspects de ma vie. Et je compte poursuivre cette quête à explorer et célébrer le côté le plus sublime de l’homme, sa position face à la mouvance de l’Esprit de Dieu, dans mes prochains recueils. 
 
Pouvez vous nous parler des défis associés à la production littéraire dans la diaspora ou peut-être dans l’Etat du Massachusetts où vous residez? Comptez vous continuer sur cette lancée? 
 
De plus en plus la lecture de la poésie se limite à un cercle restreint. Partout ce fléau ronge et réduit la production littéraire. Publier un livre de poèmes passe davantage comme un besoin personnel de faire entendre sa voix malgré le dédain du gros public. Cependant, le poète motivé qui ne peut retenir l’élan de chanter son coeur trouvera un moyen d’acheminer ses écrits au monde. Je pense aussi que tout poète doit s’engager à organiser des activités sociales autour de la poésie, à encourager les jeunes à redécouvrir la poésie, et à associer la poésie à d’autres formes d’expression et de manifestation culturelle. Dans les années à venir, je compte continuer à apporter ma contribution dans la promotion de la poésie et à maintenir sa place privilegiée dans le monde merveilleux de l’art. 
 
Propos recueillis par Charlot Lucien pour Connecticut Haitian Voice. 
 
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DE LA MORT A LA VIE 
PREFACE par Gina Jean-Baptiste 
 
De la Mort à la Vie est une oeuvre remarquable et multidimensionnelle qui retrace deux temps forts du vécu de l'auteur: la mort spirituelle, mort latente de l'ame; et la rencontre avec Jésus, passage à la Vie. 
 
A travers son troisième recueil, Malivert confirme sa passion indéniable des mots et de l'art poétique, comme mode privilégié d'expressions. 
 
De l'instrospection sans merci du poète repentant à sa rencontre salvatrice avec Christ, de sa prose romantique à sa réalité lyrique et patriotique, l'auteur exprime ses émotions avec une telle authenticité et ferveur qu'il est difficile de ne pas etre en empathie avec lui. 
 
C'est un cri déchirant, une voix singulière, au milieu du bourdonnement complaisant et de la clameur auto-suffisante des uns et des autres. A visage découvert, de manière lucide et pénétrante, l'auteur emmène ses lecteurs sur les rives sombres d'un coeur en quete de signifiance, engagé dans la "vaine poursuite de plaisirs éphémères". 
 
De la Mort à la Vie est un témoignage poignant. L'auteur offre à ses lecteurs une confession publique et unique dans laquelle il exprime de manière remarquable et émouvante son passage spirituel de la mort à la vie quand il fait la rencontre extraordinaire et inouie de "Jésus de Nazareth". 
 
Dans "Passage", l'auteur retrace cet instant inoubliable, cette prise de conscience, ce passage obligé du pécheur désespéré, laissant après lui un monde de chimères pour se retourner dans un balbutiement vers la Source d'eau vive, le Libérateur, la Lumière, Jésus, et rever désormais d'amour et d'éternité. 
 
C'est un voyage introspectif qui revèle de manière indéniable la dimension spirituelle de l'auteur qui expose ses faillites et ses chutes à la puissance rédemptrice de son Sauveur. 
 

Jésus est mon oasis 
L'ombre à l'abri du soleil 
L'épaule ou repose ma tete 
La main qui m'attrape 
Aux pans de la falaise
 
Extraits de Consolation 
 
De la Mort à la Vie symbolise le triomphe éclatant de l'Amour qui régénère, qui renouvelle, et qui libère. 
 
Gina Jean-Baptiste 
Critique Littéraire/Rédactrice 
 
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Le Nouvelliste No. 33496 
Samedi 1er et Dimanche 2 Avril 1989 
Supplément Culturel du Nouvelliste No. 9
 
 
Vin Aigre, poème 
Rodney St. Eloi 
 
Enfin one ne résiste pas à l'appel de la poésie. Elle vient d'elle-même pleine de son mystère et rejaillit à grands flots. Mario Malivert vient de publier son deuxième recueil de poèmes: VIN AIGRE. Il a déjà publié aux Éditions Choucoune, ARENE NOIRE [Poèmes, mai 1982]. 
 
VIN AIGRE 
"Sur une planète inhabitée un chandelier reste allumé". De quelle planète inhabitée nous parle le poète, on ne sait! De quel chandelier, on ne sait! Sur cette planète habitée de mots, un poète tente d'allumer un chandelier. Qu'il brille enfin—quête d'espace—refus de la ponctuation, une parole à grands jets—ce qui place en fait d'emblée Mario Malivert sur la route de la modernité poétique. 
 
"Le gris se fait plus gris" et "le soleil pleure comme une vieille sorcière". [La] descente s'opère naturellement—cette poésie n'a pas pour cadre les campagnes fleuries. Le printemps avec ses notes d'hirondelles sinon des zones sombres où l'ombre, la démarche poétique aidant, se fait éclairs, le refus du verbe et la construction est soumise aux caprices de l'auteur, à la sensation première. 
 
Voile ce qui est fascinant dans ce recueil, malgré le manque de fraicheur, on ne peut réduire cette communication. Elle s'offre dans sa totalité sans pouvoir entrer dans les schémas traditionnels et crier, interpréter, dire qu'il parle d'Amour—de Politique—voilà le message etc. La médiation gardée, le dire contenu, le langage part de lui-même et s'arrête de son gré. Une sensibilité, un naturel, un vécu, tout semble assiégé entre les lignes et parle d'un paysage fondu dans la grisaille coutumière. Le gris du soir est animé—les pleurs de soleil sont illuminés—une valeur incantatoire, un risque sans mesure dans "le fini [des] rêves". L'image nous est venue dans sa splendeur avec l'émotion de l'instant. Mario Malivert est un poète, un de ceux qui encore croit dans l'éclat saisissant de la prise de parole. 
 
Rodney St. Eloi 
 
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L'Union - Mercredi 19 Avril 1989 page 8 
Joubert Satyre 
 
Les livres: Vin Aigre de Mario Malivert 
 
Les Editions Choucoune nous ont envoyé la semaine dernière la toute nouvelle publication de Mario Malivert; un recueil de quatre-vingt-six pages intitulé: Vin Aigre. Déjà le titre porte cette ambigüité (polysémie) sémantique propre a tout texte poétique: Vin Aigre c'est à la fois du vinaigre (VinNEgR) et du Vin Aigre (VEEgR). Une sorte de calembour, de jeu de mots qui renvoie a la fonction lucide et esthétique du langage, c'est-à-dire la survalorisation de l'aspect formel du langage (au point de vue graphique et sonore) par rapport à son contenu (l'aspect sémantique). La publicité que certains considèrent comme le huitième art, joue beaucoup sur cette fonction du langage. 
 
La couverture du recueil porte un réveil, un pan de ciel nocturne, un verre de vin (aigre), une partition et une tête d'homme vue de profil. Il est très difficile de trouver une certaine cohérence entre ces éléments disparates, et nous laissons aux sémioticiens la tache de les décoder et de trouver leurs logique interne, c'est-a-dire le lien symbolique qui les unit. Toutefois le vin renvoie à la poésie (l'ivresse est un état éminemment poétique); la musique aussi (elle est la sœur puinée de la poésie dit Ronsard), le ciel étoilé renvoie à un ailleurs, à un au-delà visible mais inaccessible, comme la poésie qu'aucune lecture ne peut vider de sa substance, ni en épuiser le contenu? 
 
Ouvrons le recueil: "Vin Aigre" est la première section du recueil (qui en compte cinq) 
 
Sur les nuages un sourire 
en sanglots tant d'amours englouties 
des étoiles mourant sous un flou de brouillard 
des lilas pendus sur un balcon 
pour passer un mois d'Aout sans passion
 
(P. 9) 
 
Ce poème qui sert d'ouverture au recueil lui donne son ton: une élégie feutrée, comme une sourdine dans une langue poétique portant tous les traits de la modernité littéraire. Les thèmes de Vin Aigre appartiennent à la littérature universelle; rappelons le fameux: "Tout est déjà dit" de la Bruyère. 
 
Donc le mérite du poète (s'il en a) n'est pas dans le choix des sujets, c'est-a-dire dans les thèmes, mais dans la manière dont il a orchestre ces thèmes. Les poéticiens modernes diraient que l'originalité se situe au niveau d'expression. En effet les poèmes de Vin Aigre semblent sortir des sentiers battus (il est vrai que l'absence de ponctuation renvoie désormais à une sorte de banalité: un signe de démarcation entre la poésie "classique" et la poésie "moderne"). Mario Malivert a su créer une langue neuve pleine d'images éclatantes en dépit de certains clichés dont il n'a pu se débarrasser. 
 
Vois les missels laissés sur les parapets 
les frocs oubliés sur les bancs de parc 
les beautés écrasées par les chars 
ferme a l'instance des faces voilées 
tes yeux à la pupille fragile 
égarée à l'éblouissement des décors 
des Westerns montés en love stories 
ne vas-tu pas laisser tes yeux 
à la remorque des scènes trompeuses
 
(P. 60) 
 
Voilà ce qui est neuf et original. Lisons son poème intitulé "Autobiographie": une sorte de confession pleine d'onirisme, où le choc des images fait surgir un monde irréel: 
 
Moi apocalypse temple aux abois 
Chantre des tournoiements de l'espace 
Gris-gris perdu oiseau nocturne 
Noctambule 
L'âme jouant à cache-cache 
Avec les feux follets de l'espoir 
Énigme brin de connivence 
Lyre sans vie 
Arcane 
Temple ferme 
Exutoire des matins dédorés 
Chantre des vies sans vie
 
(P. 68) 
 
Mario Malivert est bien "le chantre des vies sans vie". Un poète qui compatit aux souffrances des autres, les démunis de la vie, fils de la gêne et du désespoir. 
 
L'amour chez Mario Malivert est dit en termes mesurés, discrets où l'allusion est la forme indirecte, métaphorique de la pudeur. 
 
Comme tout poète Mario Malivert chante l'espoir. Le présent est insupportable; mais nous ne devons jamais céder au découragement: l'avenir sera meilleur: 
 
Enrayer les réminiscences-souffrances 
combler les arènes oublier la Camargue 
nous sommes entre les spasmes des transes 
 
l'auréole coiffe notre présent 
levons la tête à l'ébloui des soleils 
ouvrons nos pores dans la fraicheur du jour 
notre futur sera merveilleux 
garni de roses vermeilles
 
(P. 32) 
 
On peut constater dans ces courtes citations que Mario Malivert emploie le plus souvent des phrases nominales ou des phrases avec des infinitifs: un procédé qui renvoie peut-être à un certain absolu, à tout ce que le langage ne peut exprimer que de manière imparfaite. 
 
Nous ne dirons pas que Mario Malivert a la figure d'un grand poète, mais au moins il en a le profil. Et c'est à tout son honneur, vu la médiocrité des œuvres de "la plupart des jeunes de la 'nouvelle génération'". 
 
La langue de Mario Malivert étonne et peut faire regimber le lecteur amateur de textes faciles, car "Vin Aigre" n'est pas trop potable et certains lui reprocheront un brin d'hermétisme. Mais le lecteur averti lira avec profit les poèmes de ce recueil, car il n'a qu'a comparer "Vin Aigre" à d'autres publications pour voir que Mario Malivert surclasse de nombreux jeunes poètes. 
 
Vin Aigre, Éditions des Antilles S.A. Mars 1989. 
 
Joubert Satyre 
 
 
 
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ARENE NOIRE DE MARIO MALIVERT 
 
Présentation et choix de textes par Christophe Charles 
 
Né le 13 Avril 1963, le jeune poète vient tout juste de boucler sa vingtième année. Après des études primaires à l'Ecole Frère Polycarpe, il est entré au Collège St-Pierre. C'est là que je l'ai rencontré et que son goût, ses dons pour la matière litteraire me l'ont fair remarquer. 
 
"J'ai commencé à écrire des vers à l'âge de treize ans, confie-t-il; je faisais alors la sixième. Je compte devenir poète, romancier et aussi artiste-peintre". Noble ambition! Malivert a déjà publié plusieurs articles critiques dans les colonnes du Nouvelliste et du Nouveau-Monde. 
 
"La poésie, pour moi, est un tout, continue-t-il; chaque poète y apporte un aspect particulier. La poésie est également pour moi une arme offensive contre les douleurs et les détresses de l'humanité." Excellent! Mais ne disons pas de Malivert qu'il est un poète engagé; le terme d'engagement est trop galvaudé depuis quelque temps. A la lecture de ses poèmes, on verra seulement que le jeune poète est très conscient de sa mission sociale et qu'il se veut humain. 
 
On est très loin d'une poésie à l'eau de rose et des roucoulements traditionnels chez les jeunes de cet âge. Sa poésie est amère, violente, électrique. Sa poésie n'est que complaintes. Gonflées de revendication et de rêve. C'est un enfant du peuple aux yeux pleins de colère et à la bouche pleine de cris. 
 
L'accent est mis sur les problèmes des braceros, des boat-people, des clochards, des portefaix, des éreintés, des sans-mamans, des crêve-la-faim des corridors des bidonvilles: 
 
"Dans les carrefours des bidonvilles 
peuplés de clochards et de portefaix 
allez les regarder qui déchirent à belles dents 
le caoutchouc de la semelle de leurs sapates 
le caoutchouc a un goût de pain, n'est-ce-pas?" 
(Crachats)
 
 
Le jeune poète atteint parfois une intensité presque insoutenable dans l'invective, l'imprécation, le réalisme merveilleux: 
 
"On a faim, l'eau de la marmite sur le feu 
chante l'hymne national des affamés … 
Et s'échappe un gaz, le gaz de la faim 
Qui s'échappe en chantant de leur ventre 
La chanson de la faim" 
(La Chanson de la Faim)
 
 
Voilà une poésie humaine, émouvante, d'une violente sincérité, d'une sincérité agressive. On sent que Malivert vit ce qu'il dit, il souffre ce qu'il crie. Ce n'est pas du narcissisme et de la masturbation pseudo-poétique. C'est une poésie vivante et virile. 
 
"Est véritablement poète, disait Joachim du Bellay, celui qui me fera indigner, apaiser, rejouir, aimer, lamenter, admirer, étonner, bref, celui qui tiendra la bride de mes sentiments, me tournant ça et là à son plaisir". A cet égard, je tiens Mario Malivert pour un poète véritable. 
 
Certes, il n'est pas encore parvenu à une maîtrise totale de la forme, mais c'est sûr qu'il a quelque chose à nous dire et qu'il sait déjà nous étonner et nous faire indigner. Je ne peux donc que lui souhaiter de poursuivre sa trajectoire et de devenir ce qu'il est. 
 
Christophe Charles 
Conjonction Revue Franco-Haitienne, Numéro 160 – Janvier 1984.
 

 

(c) Mario Malivert - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 24.08.2012
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